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Labo sciences historiques

Pôle I

 Culture, idées et transmission en Occident XIIe-XVIIe siècles

Responsable : Thierry Kouamé

Membres titulaires : Marie Barral-Baron Daussy, Sandra Bazin-Henry, Hugues Daussy, Laurence Delobette, Thomas Flum, Damien Fontvieille, Thierry Kouamé, Corinne Marchal et Émilie Rosenblieh

Le pôle « Culture, idées et transmission en Occident » embrasse un large champ chronologique allant du XIIe au XVIIe siècle, par-delà le clivage entre le Moyen Âge et la première modernité, afin de mieux comprendre les relations complexes qui unissent des phénomènes aussi divers que la Renaissance du XIIe siècle, la construction de l’État moderne, depuis sa genèse médiévale jusqu’à son affirmation absolutiste, la Renaissance artistique et la révolution humaniste des XVe et XVIe siècles, ainsi que les crises de l’Église et la Réforme protestante du XVe au XVIIe siècle. Ce pôle explore les origines et la formation de la culture occidentale moderne dans un dialogue étroit entre culture savante, structures politiques, pratiques sociales et productions artistiques. Il met aussi en évidence les réappropriations successives de l’héritage intellectuel et esthétique de l’Antiquité par les sociétés européennes tout au long de la période. Les recherches et projets de ce pôle se répartissent en deux thématiques principales, qui se fondent sur des approches complémentaires à travers la notion de transmission et le rapport entre théorie et pratique.

Enseignement, réception et acculturation

Ce thème va de la Renaissance du XIIe siècle, qui a vu la redécouverte du droit romain et de l’œuvre d’Aristote, à la remise en cause de la scolastique médiévale par la philosophie moderne et la science expérimentale du XVIIe siècle. Cette période correspond à une profonde mutation du système d’enseignement occidental avec la naissance et l’essor des universités, puis leur transformation sous l’impulsion de la pédagogie humaniste. Parallèlement, on assiste à la réception de la culture antique par les élites lettrées et à l’acculturation d’une large partie de la société aux théories et aux pratiques savantes, grâce au prestige de la culture universitaire. Les travaux menés dans le cadre de cette thématique concernent ainsi le fonctionnement des institutions d’enseignement, les transferts de modèles intellectuels et pédagogiques, l’usage de l’iconographie, de l’enluminure et de la sculpture à des fins éducatives, l’influence du droit savant sur les pratiques de gouvernement, la circulation des idées, des savoirs et des objets à travers les réseaux épistolaires. La culture matérielle fait en effet pleinement partie de cette étude de la réception, avec l’histoire du goût et des échanges artistiques, de la consommation somptuaire ou de la diffusion des objets de luxe.
En lien avec cette thématique, le projet ERC GrECI (Greek heritage in European Culture and Identity), qui se développera de 2023 à 2025, en partenariat avec les universités de Chypre et d’Oslo, vise à explorer le rôle fondamental de la culture grecque antique dans la construction de l’identité européenne. Il donnera lieu à des manifestations scientifiques en France, à Chypre et en Norvège, à la publication d’ouvrages collectifs et au recrutement de postdoctorants dans chaque université partenaire. Le projet aboutira en 2025 à un grand Congrès Research meeting à Besançon. On compte en outre trois projets en humanités numériques. Le projet ORESM, financé par le GIS CollEx-Persée de 2022 à 2024, prévoit la création d’un portail documentaire sur la vie universitaire au Moyen Âge, qui comprendra un inventaire virtuel des archives de l’université de Paris et un référentiel des auteurs médiévaux. Ce projet se fait en partenariat avec la Bibliothèque de la Sorbonne, les Archives nationales, l’ABES, l’ÉquipEx Biblissima, l’IRHT, l’École des chartes et les universités Paris 1, d’Artois, de Poitiers et de Berne. La base de données Studium Parisiense rassemble, quant à elle, un répertoire bio-bibliographique de plus de 20 000 fiches sur les membres des écoles et de l’université de Paris du XIIe au XVIe siècle. Le Corpus Riché offrira, à terme, un répertoire informatisé des sources pédagogiques et des traités d’éducation du Moyen Âge. Enfin, les membres de ce pôle envisagent de monter un projet de recherche, commun aux historiens et historiens de l’art, sur l’enseignement de l’histoire et la transmission des modèles historiques entre le XIIe et le XVIIe siècle.
Les activités de ce thème comprennent aussi l’organisation de rencontres scientifiques. À l’occasion du 600e anniversaire de l’université de Franche-Comté, un colloque international sur L’université de Dole et les fondations princières en Europe au XVe siècle se tiendra en 2023, en partenariat avec l’Institut de France, et ses actes seront publiés en 2025. Un autre colloque international, intitulé Foren des Austauschs in Europa im 15. Jahrhundert. Orte, Netzwerke, Ideen / Forum d’échanges en Europe au XVe siècle. Lieux, réseaux, idées, aura lieu en 2024, en partenariat avec l’université franco-allemande et l’université de Wuppertal. Enfin, une journée d’étude sur l’histoire de la petite enfance sera organisée en 2024 à Orgelet (Jura), en partenariat avec la Fondation pour la protection du patrimoine culturel, historique et artisanal (Lausanne).
Les membres de ce pôle sont par ailleurs engagés dans la publication de livres en lien avec la thématique. On compte ainsi trois volumes collectifs et trois entreprises d’édition de textes. L’ouvrage Examens, grades et diplômes, consacré à la validation des compétences par les universités du XIIe siècle à nos jours, sera publié aux Éditions de la Sorbonne en 2024. Le livre Naissance d’une historiographie universitaire, sur les sources et méthodes de l’historien du XVIIe siècle César Égasse du Boulay, sera édité chez Brill, la même année. Quant aux actes du colloque CORES, consacré à la circulation des objets en Europe par les canaux épistolaires du XVIe au XIXe siècle, ils seront publiés chez Brepols. Le Gabriel Project prévoit, pour sa part, d’éditer l’ensemble des chartes de fondations et statuts des collèges parisiens du Moyen Âge, en partenariat avec le Medieval Institute de l’université de Notre Dame (Indiana). Enfin, deux autres projets éditoriaux concernent l’œuvre d’Érasme : l’édition et l’annotation des Index espagnols érasmiens, en collaboration avec les universités de Barcelone et de Warwick, et la collaboration à l’édition des œuvres de cet humaniste chez Gallimard, dans la Pléiade.

Théorie, pratique et matérialité des pouvoirs

Ce thème va de la fin de la Réforme grégorienne, qui permet l’avènement d’une monarchie pontificale, à la confessionnalisation des États européens après les guerres de Religion. Cette thématique interroge donc les rapports entre pouvoir politique et pouvoir religieux au moment où se construit l’État moderne. Il s’agit non seulement de comprendre les influences réciproques entre les modèles étatique et ecclésiastique, mais encore d’étudier comment la pensée politique a été mise en œuvre dans la pratique. Ces théories ont en effet une traduction sociale, qui dépend du degré d’adhésion des groupes dominants. Mais elles ont aussi une traduction matérielle, à travers le patrimoine religieux et l’art princier. Les travaux développés au sein de cette thématique abordent ainsi la contestation de la monarchie pontificale, le rôle des chapitres cathédraux et des assemblées conciliaires dans l’élaboration de nouveaux modèles de gouvernement, la sociologie des élites politiques comtoises et bourguignonnes, l’architecture des cathédrales et la sculpture monumentale, le mécénat et les commandes artistiques, l’habitat et les grands décors dans les sociétés de cour, ainsi que l’histoire de la pensée politique et des institutions huguenotes du XVIe au XVIIe siècle.
Les membres de ce pôle collaborent ou envisagent de collaborer à plusieurs projets de recherches en lien avec la thématique. Le projet ANR/DFG Plafond 3D une histoire croisée des plafonds peints, financé de 2022 à 2025, porté par les universités de Bourgogne et de Munich (LMU), propose d’étudier le phénomène historique, culturel, formel et technique qu’a constitué la multiplication des décors de plafonds, peints et sculptés en Europe aux XVIIe et XVIIIe siècles. Un autre projet ANR a été déposé dans le cadre de l’AAPG2023 : dénommé LAURA et développé en partenariat avec les universités Paris 1 et de Saint-Étienne, le CNAM, l’École Polytechnique, les Archives nationales et l’entreprise Ouestware, il a pour but de créer une plateforme informatique pour fouiller, croiser et enrichir les très grandes bases de données prosopographiques en histoire, à partir de corpus décrivant les élites politiques de l’Europe médiévale. Le réseau RETA2B, sur les retables en Bourgogne-Franche-Comté, prépare, avec la DRAC, l’université de Bourgogne et les musées de la région, le dépôt d’un projet ANR à l’horizon 2024 sur le retable en France à la fin du Moyen Âge et à l’époque moderne. Quant au projet ANER Grandduché, financé de 2022 à 2026 par la région et porté par l’université de Bourgogne et le Musée du Louvre, il étudie la sculpture bourguignonne du XVe siècle. Un projet d’étude des parties hautes de la nef et de la toiture de la cathédrale de Besançon sera déposé en 2023, en partenariat avec la DRAC. Enfin, deux projets en humanités numériques sont centrés sur des règnes de rois de France : l’Opération Charles VI, répertoire informatisé de plus de 6 000 individus actifs en France entre 1380 et 1422, en partenariat avec l’université Paris 1, et la publication en ligne de la correspondance d’Henri IV par rétro-conversion des lettres éditées depuis le milieu du XIXe siècle, en partenariat avec l’École des chartes.
Les activités de ce thème comprennent aussi l’organisation de rencontres scientifiques. Le programme La décision collective et ses critiques organise, en partenariat avec les politologues de l’université Paris Nanterre, des cycles d’ateliers interdisciplinaires qui donneront lieu à un dossier thématique dans la revue Genèses, ainsi qu’à la publication d’un ouvrage collectif après 2024. À l’occasion du colloque sur La cathédrale de Metz en 1522 (organisé en 2023), l’étude archéologique et historique du chœur gothique tardif de cette cathédrale pourra faire l’objet d’un contrat doctoral (2023-2026). Un autre colloque se tiendra en 2023 sur Les matières du décor, XVIe-XVIIIe siècle, en vue de proposer une session au Congrès international du Comité international d’histoire de l’art (Lyon, 2024), qui aura pour thématique Matière/Matérialité.
Les projets de publications rattachés à ce thème comprennent cinq volumes collectifs, trois monographies et une entreprise d’édition de textes. L’ouvrage La Pragmatique Sanction de Bourges dans tous ses états, issu du projet Écrits polémiques entre l’Église et l’État, sera publié aux Éditions de la Sorbonne en 2024. Le volume sur Louis de Condé. Prince du sang et huguenot (1530-1569), tiré du colloque de Chantilly, paraîtra chez Brepols. L’ouvrage collectif sur les Réseaux et pratiques de la clandestinité au temps des guerres de religion sera publié, quant à lui, chez Peter Lang. Par ailleurs, deux livres sont encore en préparation : l’Atlas historique de la ville de Besançon (dans la série des « Atlas historiques des villes de France ») et La France huguenote, ouvrage collectif sur les institutions religieuses et politiques protestantes, tant dans le royaume de France que dans les espaces du Refuge européen. Les monographies comprennent, pour leur part, une Histoire politique de la Réforme française (1555-1685), à paraître chez Perrin, un volume consacré à L’édit de Nantes et sa révocation, à paraître chez Gallimard, dans « Les journées qui ont fait la France », et l’ouvrage L’archipel d’une illusion. Le mirage de l’irénisme (ca. 1520-ca. 1560), à paraître chez Droz, dans les « Travaux d’Humanisme et Renaissance ». Enfin, l’humanisme sera encore au cœur d’une entreprise éditoriale avec l’annotation historique de l’édition des œuvres de Thomas More chez Gallimard, dans la Pléiade.